lundi 10 mars 2008

Le texte le plus poche 2008 - Médéa

Médéa n’entend plus à rire. La rumeur coure qu’elle est la plus cocufiée de l’Île de Montréal. De mauvaise langue parle d’une simple petite secrétaire perfide, une petite drôle au visage refait et aux seins gonflés aux silicones. Une petite garce au nom original de Stéphanie Borduas. Une petite intrigante sans éducation, ni manière. Son mari, ce cher John Shaw, ose se promener au bras de cette petite chatte, à peine majeure, devant leurs amis communs.

Médéa est une grecque, qui a émigrée au Canada afin de suivre son mari, John, qui était alors un petit courtier ontarien en bourse sans importance. Médéa, qui connaissait l’art du trading, par son père, qui était lui-même était un fameux trader grec. À l’aide de ses connaissances, elle avait aidé son mari à devenir un des hommes les plus important et influent du Canada. Sans elle, cet homme ne se serait jamais démarqué des autres petits traders. Elle a fait cet homme. Et par-dessus le marché, elle lui a donné deux magnifiques garçons, Eli et Mikael. À cet homme, elle a tout donné. Sa jeunesse, sa beauté, son intelligence.

Puis vient le drame. John est soupçonné de délit d’initié. Afin de fuir le scandale qui grossit, la famille Shaw se réfugie à Montréal. Et voilà le vrai drame, le sien. Une petite pouffiasse québécoise charme son mari qui tombe bêtement amoureux et ose la tromper, elle Médéa Shaw.

Elle regarde le ciel se voiler. Demain, c’est le 24 avril. Ce sera le Bal des Jonquilles. Elle sait que John s’y trouvera en compagnie de son amante. Elle ira à sa rencontre pour le confronter.

Le soir même, elle feint de ne pas apercevoir la présence de son mari qui se prépare pour l’événement. Il l’ignore également. Dans la tête de John Shaw, il n’y en a que pour Stéphanie et pour ses talents, disons… physique. Il pense au notaire, qu’il faut aller consulter, afin de préparer la lettre de divorce. À l’attitude de sa femme, il n’ignore pas qu’elle est au courant de la situation.

Une fois parti, c’est au tour de Médéa de se préparer. Rapidement, elle se coiffe, se poudre, se parfume. Malgré son nouveau statut de femme cocufiée, elle garde toujours à l’idée qu’on ne doit pas montrer à quel point on est détruit. Habillée de sa plus belle robe Balenciaga, elle va voir ses fils jouer dans la salle de jeu. La petite gardienne, fille d’un de leur proche voisin, est arrivée quelques instants plus tôt et s’amuse avec les deux enfants. Médéa caresse la tête brune de Mikael et surprise dans un élan de faiblesse, s’écroule par terre, serrant dans ses bras ses deux enfants. Ils sont tout ce qu’il lui reste, à présent.

Deux heures plus tard, Médéa arrive face à la Gare Windsor. Elle n’a pas de billet d’entrée, mais étant une des plus importantes donatrices de la Société Canadienne du Cancer, elle entre sans problème. Caché par un cercle de gens influents, elle repère rapidement son mari. Une grande blonde peroxydée s’accroche aux bras de John.
Soudainement, le directeur de la Banque du Canada, Conrad Richmond, vient à leur rencontre. Conrad est un vieil ami du couple. Médéa ne peut distinguer les paroles qu’il prononce envers son mari, mais elle peut comprendre facilement que celui-ci est scandalisé par la présence de sa maîtresse.

Celle-ci, justement, s’éloigne des deux hommes, probablement ennuyée par la dispute dont elle est la cause. Elle s’avance vers un buffet derrière Médéa. Stéphanie se place finalement proche de Médéa. Elle semble complètement ignorer qui est la femme qui se trouve à ses côtés. La cocufiée.

« Bonjour », lui dit Médéa. Stéphanie, surprise qu’on lui adresse la parole, la regarde bêtement. Médéa, se rendant compte de l’ignorance, essaie d’engager la conversation avec la jeune femme. « Je ne vous ai jamais vu ici. »

« Non, j’sais », lui répondit la maîtresse de son mari. « Chuis la nouvelle blonde de John. »

« Ah?… N’avait-il pas une femme? Une Grecque? »

« Han, oui. C’est juste qu’elle a pas encore reçu sa demande en divorce. Coudonc, Est-qu’y’a quelque chose de mangeable, ici? » Demanda Stéphanie, en prenant un petit canapé au beurre de noix. Méprisante, Médéa lui suggéra de goûter à celui qu’elle tenait dans ses mains avant de poser la question, ce que Stéphanie fit sur-le-champ.

Choquée par la vulgarité de la maîtresse et par sa stupidité, Médéa se dirigea, suffocante d’indignation, vers les toilettes afin de reprendre le dessus.

Rendue dans la salle de bain, elle se regarde dans le miroir. Elle était partie avec l’idée de confronter John et sa mijaurée, mais elle n’en a finalement pas la force. Brusquement, des cris se font entendre. Médéa sort en vitesse, se dirigeant vers les cris. Un attroupement lui cache la vue. Elle pousse quelques personnes afin de se faufiler vers la raison des cris.

À terre, Stéphanie convulse, John, paniqué, appelle les ambulances. Puis Stéphanie râle et son corps flasque devient inerte. John hurle son désespoir en prenant le corps de sa maîtresse. À terre, Médéa regarde le canapé qu’elle avait conseillé à l’amante.

John croise les yeux de Médéa. Il suit le regard de Médéa vers le canapé à terre. Il le prend, puis le sent. Il se lève d’un bond, se précipita vers sa femme, l’empoignant durement.

« C’est toi qui l’as tué! Je le sais! Stéphanie était allergique aux noix! Je suis sûr que tu le savais! » Soudain, son téléphone cellulaire sonne. « La… la maison est en feu. Fuite de gaz. Les enfants sont morts. La gardienne aussi. » Il s’effondre par terre.

Médéa pousse un hurlement, puis s’effondre à son tour. Richmond vient à son secours. John, les yeux morts, la regarde.

« C’est elle, c’est ma femme qui a tué mes enfants, la gardienne et mon amie. C’est… la Grecque. »


Basé sur le mythe de Médée, pour un travail dans le cadre du cours "Culture et Imaginaire"... un autre pastiche d'actualisation.

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